Au début, Louna n'arrivait pas à téter. Venue un mois trop tôt, elle a été emmenée aux soins intensifs tout de suite après sa naissance et on lui a donnée des biberons.
Cela nous a pris deux mois jusqu'à ce qu'elle prenne le sein. Deux mois à tirer le lait maternel à l'aide d'un tire lait. Deux mois aux biberons où on voyait combien de lait elle pouvait boire à la fois : 30ml, 40ml, 60ml. Une lutte à chaque fois pour qu'elle en prenne assez. Concernant les biberons, les médecins, les infirmières, ma sœur qui avait déjà deux enfants et même la sage-femme m'avaient conseillée de respecter un rythme de deux heures au moins, pour qu'elle boive plus à la fois. Et aussi de contrôler son poids régulièrement. Aujourd'hui, je vois à quel point nous étions stressées et je me rends compte aussi que j'étais entourée de professionnels qui ne savaient rien sur l'allaitement.
Puis un jour, enfin, elle le fit. Elle s'accrocha au sein. Elle y prit tellement de goût qu'elle ne voulait faire que cela, téter, parfois toute la matinée. Toutes fières nous sommes arrivées chez notre médecin qui nous dit « Oui, mais si elle n'arrive pas à tenir sans téter au moins pendant deux heures, vous devez lui donner un biberon ! »
Après deux mois de lutte ? Ma fille venait tout juste de prendre le sein depuis une semaine. Ce médecin ignorait que l'allaitement nécessite un peu d'entraînement.
De toute façon, c'est Louna qui décida. Notre congélateur était plein de lait maternel mais elle refusait désormais tout biberon.
Depuis qu'elle est née, elle n'a jamais suivi les médecins: Concernant son poids, elle était toujours dans la courbe mais au niveau le plus bas. Elle ne buvait jamais assez et elle ne tenait jamais le rythme conseillé.
Cette situation, où les médecins dictaient une conduite et Louna faisait autrement, s'est transformée en conflit qui pesait sur moi et sur notre famille. Nous ne pouvions pas continuer ainsi.
Nous avons alors pris la décision de voir une conseillère en allaitement, Yasemine, une trentenaire avec six enfants qui a changé notre vie. La première chose qu'elle m'a dit: « Oubliez votre médecin, le rythme et la balance. Laissez la dormir avec vous, dans votre lit, ainsi elle peut téter quand elle veut ! » A l'époque, Louna avait quatre mois, elle faisait ses nuits.
Nous avons commencé par ne plus tenir compte du rythme. Au début j'avais toujours la montre devant les yeux ... « la dernière fois, c'était il y a une demi heure » mais petit à petit je remarquais que c'était plus facile sans la montre. Elle pleurait moins.
Le problème du médecin s'est résolu tout seul : nous déménagions un mois plus tard.
Et le lit parental ? A cinq mois, Louna se réveillait une fois, puis deux à trois fois pendant la nuit. A l'âge de six mois, c'était une fois par heure et finalement je ne pouvais plus la coucher dans son lit, sans qu'elle ne commence à pleurer. Depuis elle dort avec nous. Et cela lui a fait prendre du poids. Sur les photos de l'époque où elle avait neuf mois, je vois un visage et des mollets bien ronds et sains.
Au fur et à mesure je me rendais compte que les conseils de Yasemine nous conduisaient dans la bonne direction. Non seulement nous n'avions plus le souci de poids, mais aussi je me rapprochais sentimentalement de ma fille : quand la porter, quand l'allaiter, quand lui donner à manger, je laissais de plus en plus décider mes sentiments, et mon instinct maternel. Elle pleurait moins et notre relation est devenue bien plus harmonieuse.
Concernant la diversification, j'ai voulu commencer à partir du septième mois. Mais elle n'y a montré aucun intérêt. Alors nous avons attendu le huitième puis le neuvième mois tout en lui proposant différentes choses à manger. Elle n'aimait pas trop être nourrie à la cuillère mais elle commençait à grignoter dans nos assiettes et ce qui se trouvait sur la table et à se servir à la cuillère elle-même.
Puis, à l'âge d'un an, elle a connu sa Nounou.
Petit à petit l'allaitement n'est devenu qu'un moyen de se consoler dans des situations difficiles et de se rassurer de l'amour de sa Maman. Un câlin tout court.
Du au travail de mon conjoint, nous avons déménagé plusieurs fois depuis que Louna est née. Nous n'avons jamais eu de problèmes concernant ces changements de situations. Elle gardait son air zen et heureux.
Des nuits blanches à cause des dents qui sortent ? On se réveille, on tête et on s'endort aussitôt.
Dans mon entourage les gens me disent qu'ils ont l'impression que Louna ne pleure jamais, qu'elle est autonome et débrouillarde. Moi, je dirais qu'elle est comme les enfants de son âge, elle n'est pas une fille difficile.
Je réfléchis parfois sur la durée de l'allaitement de ma fille et je pense à Yasemine dont les enfants se sont tous sevrés eux-mêmes.
Au début je ne me voyais pas l'allaiter encore jusqu'à l'âge de deux ans. Mais le moment venu je ne pouvais imaginer d'arrêter non plus, tellement elle aime ses moments de complicités. Je me suis dit que tant qu'elle ne veut pas arrêter elle-même, elle en a besoin. Je ne l'encourage pas à téter et je refuse à certains moments ou je suis stressée, fatiguée ou je n'ai pas envie, selon mon sentiment. Et... Que cela fait du bien de rentrer le soir et de prendre une bonne tétée en toute tranquillité avec Maman !
En ce moment nous apprécions l'allaitement toutes les deux. Si un jour je sens que je ne veux plus l'allaiter nous trouverons une solution douce qui nous amène petit à petit à une situation heureuse pour tout le monde. Mais peut-être que Louna décidera avant !
Vicky/février 2007.
Page mise ŕ jour le 25/06/2014