Jusqu’à la fin du XIX siècle, pour pallier les carences de la mère ou les insuffisances des nourrices trop sollicitées, seuls les laits d’animaux étaient utilisés.
Le « must » était alors le lait d’ânesse, très digeste pour le petit humain.
Par contre une ânesse donnant au maximum 2 litres de lait par jour (une partie était réservée pour son ânon), ce lait ne pouvait être donné qu’à quelques bébés privilégiés…
Le lait de chèvre a souvent été utilisé, mais étant moins sucré et plus riche en caséine que le lait humain, il était très mal digéré et donc coupé avec de l’eau sucrée…
Quant au lait de vache, bien que facilement disponible, il posait de gros problème de digestibilité. Il était coupé avec de l’eau d’orge, du gruau, des décoctions de lentilles ou autres féculents, ce qui aggravait les choses…Son emploi se généralisa néanmoins à partir de la deuxième moitié du XIX siècle.
Les précautions d’hygiène quant à la traite étaient bien sûr ignorées…l’allaitement direct au pis était donc fréquent…( pour l’ânesse, il était obligatoire de garder l’ânon à proximité pour téter sinon le lait se tarissait). La chèvre se révéla une parfaite nourrice, avec un peu d’entraînement elle allait elle-même proposer ses mamelles au nourrisson couché dans un berceau à bonne hauteur !
Le milieu médical commença à s’intéresser à la qualité du lait destiné aux nourrissons dans les années 1890..devant les épidémies de gastro entérites…
L’ébullition du lait a mis du temps avant d’être généralisée. Malgré les travaux de Pasteur, ce ne sera qu’en 1889 que le corps médical se prononcera en faveur du lait bouilli.
La pasteurisation, qui permet de conserver le lait 24 à 36h ne sera adoptée que tardivement (auparavant on rajoutait du bicarbonate de soude à hautes doses pour la conservation). Ce lait pasteurisé n’était livré qu’en grands récipients qu’il fallait transvaser…d’où de nouvelles occasions de contamination…
Enfin fut inventé un appareil destiné à stériliser les récipients de lait à domicile…, les mères apprenant à stériliser plus simplement au bain-marie…
Les recherches pour une conservation longue du lait seront à l’origine des laits condensés ou concentrés, auxquels il faut rajouter 4 volumes d’eau avant de porter à ébullition.
Bien que le lait stérilisé soit plus digeste que le lait cru ou bouilli (la caséine est modifiée par la chaleur), il restait inadapté…Les inventeurs tentèrent alors (et tentent toujours) de le modifier pour le rendre plus proche du lait maternel…Parallèlement aux laits « maternisés » des chercheurs créèrent des laits artificiels. Par exemple la maison Liebig mit au point une « soupe aux aliments pour les nourrissons » qui eut beaucoup de succès en Allemagne, en Angleterre et aux Etats-Unis, mais non en France, où se développaient plutôt les « farines lactées ».
Le lait humain commence à être connu du point de vue biochimique…(avec d’énormes lacunes, par exemple le fait que sa composition évolue dans le temps est ignorée…) donc les chercheurs tentent d’adapter le lait de vache (animal choisi pour sa production et facilité de traite plus que pour l'adéquation de son lait).
Il s’agit de :
-passer de 35g/l de protéines (LV) à 9g/l …
il a été choisi de couper de moitié, en gardant volontairement un taux supérieur à 9g/l ( car plus que la quantité, c’est la qualité qui importe et on sait que les compositions de ces protéines sont différentes suivant les espèces, et que le lait humain contient des enzymes d’utilisation que ne possède pas le lait de vache.)
-sucrer ce produit coupé pour ramener le taux à 70g/l. Le choix premier a été uniquement du lactose…(comme dans le lait humain…)
-éliminer une partie des graisses animales donc écrémer partiellement, et rajouter quelques huiles végétales insaturées.
Mais cela s’avéra indigeste (trop de caséine) . Cette caséine fut donc remplacée partiellement par du « lactosérum », à des taux variant entre 50/50, 40/60 ou 60/40…
Un autre problème se fit jour : le lactose à 70g/l entrainait des selles liquides et acides…donc sa fraction fut réduite et on ajouta du dextrine-maltose, plus constipant.
Malgré les 15 à 20g/l de protéines, les bébés n’étaient pas toujours bien rassasiés, bien que prenant des doses importantes de lait…
(un fait élémentaire que constatent tous les parents : les selles d'un bébé allaité n'ont rien à voir ni à sentir....avec celles d'un bébé nourri au lait industriel...l'organisme se débarrasserait-il de tous les éléments inutiles de ces laits?)
-rajouter artificiellement toute nouvelle molécule mise en évidence dans le lait maternel
Les derniers ajouts faits à ces laits sont tous sujets à interrogations…dès qu’une nouvelle molécule est détectée dans le lait maternel on tente de l’introduire dans ces préparations…en oubliant en particulier que le lait maternel contient toujours l’enzyme « qui va avec »…
Certaines substances ne peuvent par être incorporées de toutes façons (les cellules tout particulièrement, qui elles-mêmes secrètent de nombreuses substances)
Le produit "fini" semble donc extrêment synthétique, insatisfaisant puisque sujet à d'éternelles modifications...
La recherche sur le lait industriel est-elle encore légitime?
Depuis, d'autres « avatars » ont vu le jour…on peut citer les laits :
-HA (hypo allergèniques) avec des protéines ârtiellement hydrolysées, à utiliser éventuellement en prévention quand existent des allergies familiales (et que l'allaitement exclusif, qui serait de loin la meilleure solution, n'est pas envisagé)
-« transit » (contenant plus de lactose)
-AC (« anticoliques »)
-« pour le relais d’allaitement maternel »…signifiant simplement un nouveau créneau ?
-avec ajout de pré, pro voire sym biotiques...
…et d’autres, existants ou à venir
ceci en se limitant au 1er âge….
Tout cela est bien entendu réglementé
L'AFSSA fait régulièrement des études à partir des dossiers présentés par l'industrie laitière infantile, pour chaque nouvel ingrédient susceptible d'être ajouté dans une préparation pour nourrissons
il n'est jamais précisé qu'il s'agit pour les 1ers ingrédients (de base) de lait de VACHE...
Un autre "détail" : un bébé nourri avec un lait industriel boira pendant 6 mois exactement la même chose (même s'il y a changement de marque). Cela justifie d'ailleurs les précautions prises (par l' AFSSA par exemple), ces produits constituants à cet âge la seule nourriture d'un organisme en croissance.
On peut dire que l'enfant au biberon mange au menu, l'enfant au sein à la carte.
Actuellement fleurissent régulièrement des publications de laboratoires faisant part d’une avancée décisive dans la constitution de leurs produits …toujours mieux, toujours plus proche du lait maternel…en oubliant qu’ils comparent un produit inerte au résultat vivant d’un processus naturel humain
(d'ailleurs l'AFSSA précise dans le document "dossier" cité plus haut que "la présence à elle seule d'un composant dans le lait humain ne saurait justifier une allégation nutritionnelle)
Les préparations pour nourrissons "bio" résoudraient-elles une partie du problème?
Rien n'est moins sûr.
Le texte suivant* figure sur le produit, comme sur tout autre produit laitier à bas de lat "bio"
*"Le lait écrémé de ce produit provient de vaches françaises alimentées à l'herbe eou aux fourrages biologiques. Conformément à la réglementation pour l'agriculture biologique, elle ne reçoivent aucun antibiotique."
Cela atteste de la qualité biologique du lait à base de ces préparations, le label "AB" est présent sur les conditionnements.
Composition en 2011 d'un "lait de suite bio en poudre pour nourrisson"
(passons sur le fait que le terme "lait" n'a plus à être employé sur ces boites)
Page mise ŕ jour le 27/07/2011